Il y a 4 ans, je réagissais au débat lancé par l’article de Rao Venkatesh créant le néologisme Developeronomics, un nouveau mot inventé pour souligner l’immense valeur qui peut être accordée à un excellent développeur de logiciel.
S’appuyant sur l’idée qui a rendu le livre Freakonomics célèbre, l’auteur mettait l’emphase sur le besoin croissant de logiciels de plus en plus sophistiqués pour en déduire qu’investir dans un développeur en tant que tel est probablement l’un des meilleurs investissements à long terme, tout autant qu’acheter une action ou une bonne bouteille de vin. Comme je l’écrivais à l’époque, je reste globalement d’accord avec cette idée.
Plus précisément, celle-ci s’applique bien en ce qui concerne les développeurs de talent qui, au vu de mon expérience, peuvent produire plus qu’une équipe type de 10 développeurs moyens… et encore, à supposer que l’équipe ait les compétences pour surmonter tous les défis techniques. Par conséquent, cela reste toujours un meilleur choix d’avoir un développeur sur-compétent plutôt que sous-compétent. Cela s’avère beaucoup moins onéreux au final.
Quand je travaillais chez Microsoft, j’ai eu la chance d’entendre Bill Gates raconter l’histoire de Windows NT et comment il a embauché Dave Cutler de Digital pour faire le boulot. Quand Bill a demandé à Dave quelle serait la taille optimale de l’équipe, la 1ère réponse de Dave fut “ 1 ”. Puis il a ajouté, cette taille est celle qui maximise l’efficacité mais sachant que du point de vue du marché, nous devons livrer dans un délai raisonnable, un compromis d’une équipe de 10 très bons développeurs me parait optimal.
Alors, le marché français a-t-il enfin compris ces enjeux ? A mon sens, nous nous trouvons aujourd’hui dans une situation assez contrastée.
D’un côté, un pan entier de l’industrie, notamment celui qui concerne les grandes sociétés traditionnelles, raisonne encore en logique de ‘mois-homme’ comme si la variable ‘homme’ dans cette expression était interchangeable. De nombreux décideurs stratégiques n’ont jamais développé eux-mêmes et continuent d’alimenter une tendance ‘off-shore’ en se persuadant que l’approche fonctionne. Comme ils mesurent leur succès au coût moyen d’une journée, la réussite est indéniable… jusqu’à ce que l’absence de résultat produit (ou sa très faible quantité en regard des investissements globaux) finisse par faire réagir quelqu’un en haut lieu, à supposer qu’il ait encore la liberté de le constater sans risquer son propre poste.
Par ailleurs, l’univers bouillonnant des entreprises liées au numérique, et les cohortes de PME plus pragmatiques qui ne peuvent se permettre les grands échecs de projet qu’assument sans vergogne les grands groupes, bataillent avec âpreté pour s’arracher les développeurs du marché. Elles pratiquent même parfois une surenchère quelque peu aveugle car tous les développeurs ne sont pas les talents à effet de levier évoqué plus haut. Quoiqu’il en soit, les compétences restent insuffisantes par rapport aux besoins nouveaux de développement logiciel, et la concurrence est rude, ce qui a d’ailleurs amené entre temps des initiatives telles que l’Ecole 42.
Revenons aussi sur la phrase “ Chaque année que nous écrivons du logiciel qui nous dispense d’avoir à écrire plus de logiciel ”. Il se trouve toujours des développeurs pour l’interpréter comme un danger pour leur emploi, comme si on allait un jour en avoir fini : “ C’est bon on a tout ce qu’il faut, maintenant nous devons juste maintenir la base mondiale de code source ! ”.
Le logiciel est aussi infini que la connaissance. Un professeur m’avait un jour parlé du “ cône du savoir ”. La science avance selon une forme de ce type. Plus on va vers la droite, plus on sait de choses (ce qui est à gauche), mais plus l’horizon de découverte est large.
Ainsi, plus on en sait, plus il en reste à découvrir. C’est exactement pareil avec le logiciel. Certes, certaines couches deviennent des commodités, apanage de quelques grands leaders, mais il reste des univers entiers à défricher et au sein desquels on peut créer de la valeur.
Du coup, les développeurs doivent sans cesse adapter leurs compétences aux outils et aux technologies en constante amélioration et avancer vers la droite pour rester compétitifs. C’est ce qui fait l’intérêt et la valeur de ce métier.
C’est pourquoi je suis toujours à l’affût de ceux qui trouvent cela particulièrement intéressant, car ce sont dans ces développeurs que je suis motivé d’investir.
Et du point de vue de nos propres produits, nous nous inscrivons dans ces avancées également :
- pour les développeurs d’une part, avec le produit CodeFluent Entities qui automatise les tâches répétitives de développement et permet d’aller encore plus vite vers la droite,
- mais aussi pour tous, avec prochainement le produit RowShare qui facilite la création de tableaux collaboratifs dans le cloud.
Et pour nos amis développeurs qui s’intéresseraient aussi à RowShare, rassurez-vous, tout sera accessible sous forme d’APIs… on ne se refait pas :)