Nous avons accueilli Jean-Marc, le nouvel interlocuteur privilégié des investisseurs de la tech et des éditeurs de logiciels. Tantôt manager de transition, tantôt CTO as a Service (CTOaaS), Jean-Marc a, notamment, pour mission d’accompagner les projets à fort enjeu technologique vers le succès.
Jean-Marc a gentiment accepté de répondre à nos questions pour faire plus ample connaissance.
Quel est ton parcours ?
J’ai intégré l’X à 18 ans tout juste. J’y ai suivi une diversification probabilités/statistiques, formation que j’ai poursuivie à l’ENSAE (École Nationale des Statistiques et de l’Administration Économique). Puis j’ai obliqué vers l’informatique théorique, cursus aboutissant à un doctorat en informatique théorique (il ne fallait pas dire « intelligence artificielle » à l’époque). La programmation par contraintes dont j’étais un des pionniers m’a amené à travailler sur les problèmes d’affectation de ressources, et parallèlement, j’ai rapidement pris des responsabilités de management. Ainsi, au sein d’EDS, j’ai vendu, réalisé avec mon équipe, et installé en 1991 le système de gestion de ressources aéroportuaires de l’aéroport de Hong-Kong. Et puis, j’ai été appelé par la jeune startup Business Objects pour prendre la tête de son département R&D (50 personnes au début), en acceptant de commencer comme lead dev et en étendant ma responsabilité tous les 3 mois. Avec l’équipe R&D, j’ai sorti “La” grande version de BO… C’est de là que j’ai acquis une réputation auprès de certains investisseurs. La croissance étant folle, Il fallait structurer. J’ai appris avec Michael Cusumano (un expert américain de l’organisation industrielle qui avait accompagné Microsoft dans sa réorganisation d’Office et qui était venu chez BO pour la même chose) à analyser, à mettre en place du changement, à dessiner l’organisation, les process, la qualité… Et c’est alors que j’ai décidé de créer mon entreprise pour le faire pour des startups.
Comment cela s’est-il passé ?
Lorsqu’en 1998, à 36 ans, après quelques années passées à la tête du département R&D de la presque déjà licorne Business Objects, j’ai créé ma société Keris Informatique avec comme projet de fournir du conseil/service aux directions techniques de startups dans le logiciel, beaucoup m’ont pris pour un fou :
« Tu n’es pas commercial, en plus, tu es plutôt timide… »
« Il n’y a pas de marché, tu vas te planter… »
« Ça n’existe pas, cette activité, tu prends tes rêves pour la réalité ! »
…
Au point où j’ai douté moi-même de la faisabilité de mon idée : influencé par les conseils négatifs récoltés, pour quelques mois, j’ai commencé par vendre du développement au forfait… dans la sueur … et avec une efficacité peu glorieuse ! Je me rappellerai toute ma vie ce premier contrat de 16 000 FF (3 000 euros d’aujourd’hui environ), que je suis allé chercher en avion et voiture de location à Gap, chez l’éditeur qui m’avait fait confiance, car même pour cette activité classique, je n’avais pas trouvé autre client qu’un éditeur de logiciels.
J’ai continué dans la douleur à essayer de développer cette activité de service qui ne me correspondait pas et pour laquelle il y avait à coup sûr un marché, mais dont je constatais jour après jour qu’il ne m’attendait visiblement pas…
Comment as-tu basculé vers le CTO as a Service ?
Un jour, un ancien collègue devenu ami m’a appelé pour me demander de faire un audit technique de l’éditeur dont il avait pris la direction technique. Et puis, de fil en aiguille, par le réseau, par la réputation, c’est mon projet initial de service/conseil aux startups d’édition de logiciels qui s’est substitué au projet soi-disant sécurisant de service… jusqu’à atteindre rapidement le million d’euros de chiffre d’affaires annuel.
A l’époque, j’ai appelé cela CTOffice (pour Chief Technology Office). Aujourd’hui, on parle plutôt de CTO as a Service (CTOaaS).
Depuis, sous une forme ou une autre, j’ai continué de fournir une prestation de CTOffice/CTOaaS pour les startups du logiciel. Cela fait 25 ans passés à auditer, conseiller des startups mais aussi à accompagner, et dans certains cas, à rejoindre. Avec quelques très jolies réussites et toujours de riches et belles expériences.
Quel est ton bilan ?
Une grande variété de projets ! Une belle collection d’expériences ! Une collaboration avec des centaines de startups, dans tous les secteurs. Une multiplicité de problématiques : de l’assistance à la réorganisation au coaching du CTO, en passant par de la transition, du management d’équipes très variées, souvent pluridisciplinaires, souvent transnationales, des brevets déposés, de la convergence algorithmique, de l’industrialisation… Je peux affirmer aujourd’hui sans complexe que j’ai eu une chance magnifique de vivre toutes ces aventures !
En 25 ans, pas mal de choses ont changé. L’écosystème s’est considérablement développé, les investisseurs se sont multipliés et ont mûri, les nouvelles technologies se sont multipliées et pour certaines standardisées, le profil des équipes a beaucoup évolué, la culture tech et business a aussi beaucoup évolué.
Mais ce qui n’a pas changé en 25 ans, c’est l’enthousiasme des populations des startups, le désir d’innovation, l’envie de conquérir le monde, la variété et l’intérêt de travailler pour ces startups qui émergent dans tous les secteurs…
Même les éditeurs ayant un historique assez important sont contraints de se réinventer et adoptent des méthodes et approches de startup, avec des organisations centrées sur le produit, de l’agilité d’équipe jusqu’à l’agilité à l’échelle et des bouleversements structurels tels que le passage généralisé au SaaS.
Pourquoi rejoindre SoftFluent, quels ont été les éléments déclencheurs ?
Je connais son fondateur, Daniel Cohen Zardi, depuis longtemps (une quinzaine d’années), depuis une commission qu’il avait animée au sein de l’AFDEL (Association Française des Éditeurs de Logiciels, devenue Tech’in France puis Numeum). Puis nos routes se sont croisées plusieurs fois et j’ai eu l’opportunité de travailler régulièrement avec lui et ses équipes, en tant qu’indépendant, sur plusieurs projets. Avec toujours le même plaisir, le sentiment de parler le même langage.
SoftFluent est une société à l’ADN technique, dont le métier est l’édition de logiciels. C’est pourquoi lorsque j’ai réfléchi à recréer un centre d’excellence autour de l’activité CTOaaS, j’ai pensé naturellement à SoftFluent.
En quoi est-ce un nouveau challenge pour toi ?
C’est à la fois une nouveauté et un recommencement.
Un recommencement : parce que, comme je l’ai dit, j’ai déjà mené un tel projet il y a 25 ans. Mais un nouveau challenge aussi et pour plusieurs raisons :
– Le monde tech a énormément changé en France en 25 ans : les investisseurs se sont multipliés, professionnalisés, internationalisés. Les technos d’aujourd’hui permettent un développement bien plus rapide avec des équipes moindres. La culture Produit s’est bien diffusée au sein des éditeurs, les méthodos ont énormément évolué, on est passé du stade de l’artisanat à celui de l’industrialisation.
– Aujourd’hui, il est absolument nécessaire pour un CTO de pouvoir s’appuyer sur une expertise technique de haut niveau comme celle que peut fournir SoftFluent. Aussi, une offre de CTOaaS se conçoit, à mon avis, de moins en moins sans une puissante synergie conseil/service basée sur un éventail de compétences.
– C’est aussi pour moi un challenge que de partager mon expérience avec de nouvelles générations de consultants qui poursuivront l’aventure après moi.
Notre pari au sein de SoftFluent est de devenir rapidement un centre d’excellence sur lequel pourront s’appuyer les investisseurs de la tech et les éditeurs de logiciels afin de consolider leur organisation technique, leurs choix technologiques, faire face à un défi technique ou une crise interne, pour se développer avec succès en innovant et en capitalisant sur leurs actifs technologiques.
Ton mot de la fin ?
En guise de conclusion, je ne dirai qu’une chose : CTOaaS est assurément pour moi un des plus beaux métiers au monde et je suis heureux de le poursuivre aujourd’hui au sein de SoftFluent, dont l’ambition est de fédérer une équipe de très haut niveau sur le sujet en transmettant ces expériences vers les nouvelles générations.
Le début d’une nouvelle page pour moi, mais toujours le même métier avec une envie et une passion intactes.